1899, avril – Lévina (Lavina) St-Onge, 14 ans
- 19 nov. 2024
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Filicide par un père – Objet contondant
Maniwaki – 1 SC
Non élucidé. Jacques Boileau, son père adoptif, acquitté.
Levina St-Onge, 14 ans, était la fille adoptive de M. et Mme Jacques Boileau. Le corps de la jeune fille a été trouvé dans la maison de ses parents et n’a été déplacé que le lendemain pour être transporté jusqu’à Maniwaki, où s’est tenu l’enquête du coroner. Quoique Le Courrier du Canada parlait avec évidence d’un meurtre, l’autopsie a révélé que Levina aurait succombée à une « congestion de cerveau, causée par une blessure faite avec un instrument contondant. […] Les habitants de Boisfranc et des environs soupçonnent M. et Mme Boileau d’avoir commis le meurtre, mais ces derniers prétendent que la jeune fille était en excellente santé quand ils l’ont laissée le matin. […] La fille St-Onge est la deuxième de sa famille qui a été assassinée. Il y a quelques années une des sœurs de Lévina fut assassinée, et le père fut accusé du crime, mais il ne fut jamais condamné. La famille Boileau adopta Levina à l’âge de 2 ans, parce qu’elle voulait une fille et principalement parce que l’enfant était maltraitée par des parents cruels. »275
D’après certaines preuves déposées devant le coroner, Boileau aurait lui aussi eu un comportement violent envers sa fille adoptive. On souligne d’ailleurs que « Mme Boileau était jalouse d’elle [Lévina]. » Par le passé, le couple Boileau avait vécu avec Lévina et Sam, un fils que Mme Boileau avait eu d’un premier mariage, dans une petite maison située à environ 13 milles de Maniwaki. « La maison ne contenait qu’une seule chambre dans laquelle tous quatre habitaient. Il y a quelques semaines, Boileau chassa de sa maison, avec une carabine, le fils de sa femme qui voulait, paraît-il, détourner la jeune fille de la maison de son père. »
Selon des témoins, le couple Boileau se disputait fréquemment et ne se mêlait pas au voisinage. D’après l’autopsie pratiquée par le Dr Mulligan, la jeune fille portait une blessure à la bouche, des égratignures aux mains et ce qui lui semblait être des marques d’ongle aux coudes.
Le procès de Jacques Boileau s’est tenu à Hull en mars 1900 devant le juge Lavergne. Selon le témoignage du révérend père Desjardins, Boileau entretenait une relation avec sa victime. Toutefois, Me Champagne, l’avocat de l’accusé, a gagné son point en faisant rayer la déposition du prêtre. De plus, la défense a mis en lumière qu’au moment de la mort de Lévina le prêtre n’avait pas vu l’accusé depuis au moins 17 mois. « L’auditoire, fort nombreux, donna des signes de satisfaction, non pas, bien entendu parce que c’était un prêtre, mais à cause du succès remporté par M. Champagne et de la sympathie populaire pour Boileau. Ce dernier, debout, l’avant-bras appuyé sur la barre, et penché en avant pour mieux entendre, ne perd pas un mot de ce que disent les témoins. »276
La Couronne soutenait que personne n’était allé chez les Boileau durant leur absence, le 13 avril 1899, alors que la défense ait passé à deux doigts de prouver qu’un bûcheron, qui travaillait à proximité, s’y était rendu dans l’espoir de trouver une hache pour remplacer celle dont il avait brisé le manche. De plus, Me Champagne a réussi à démontrer la partialité de plusieurs témoins de la Couronne en raison de leur haine envers les Boileau. Quant au l’huissier, il aurait constaté la présence de pistes de raquette autour de la maison lors de son arrivée, peu de temps après le signalement du crime.
Le 15 mars, Boileau était acquitté. « La foule a fait une véritable ovation au prisonnier dès que le verdict fut rendu. »277 Boileau a même remercié La Presse « qui seule a pris sa défense pour le sauver. » En fait, selon le reporter du quotidien montréalais, Boileau était en larmes à sa sortie du palais de justice. « Boileau est sorti de prison aussitôt. Il n’a pas été lent à faire sa toilette. Il est traversé chez son avocat où trois cents personnes bloquaient la rue, lui faisant une ovation. Boileau fut acclamé. Le bureau de l’avocat fut bientôt rempli. […] Il a déclaré qu’il retournerait rester à Bois-Franc et qu’il serait sur ses gardes pour éviter quelque coup de traître. Il commencera à travailler et à se construire un domaine en attendant le retour de sa femme. »278
En attendant son procès, Mme Boileau a été remise en liberté moyennant une caution de 2 000$.279 Il semble que les accusations ont finalement été abandonnées contre elle.
Dans La Presse du 27 avril 1899, on raconte que 10 ans plus tôt une sœur de Levina avait aussi été assassinée, et que, 5 ans auparavant (1894?) c’était au tour d’une jeune fille du nom de Jones.
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