Homicide domestique par un conjoint non suicidaire – arme blanche (couteau)
Montréal, 209 rue Montcalm – 1 SC
Magloire Hogue, son 2e mari de 48 ans, condamné à mort, sentence commuée.
Après la mort de son premier mari, qui était policier, Agnès Marier a de nouveau convolé en justes noces avec Magloire Hogue. Le couple habitait au 209 rue Montcalm à Montréal. Depuis octobre 1903, un couple du nom de Fréchette a loué une chambre à l’intérieur de leur maison.
Le 12 avril 1904, vers 23h30, alors qu’Agnès ne quittait plus son lit en raison de la maladie, le constable Laurin patrouillait sur la rue Montcalm quand Zénophile Loiselle, le fils d’un boulanger, est venu le trouver. Nerveux, Loiselle lui a demandé de venir immédiatement au 209 rue Montcalm puisque, selon lui, Mme Hogue venait d’être assassinée. Laurin l’a suivi et a découvert le corps d’Agnès dans son lit. Une lampe déposée sur un bureau éclairait encore la scène. Immédiatement, le constable a verrouillé la porte de la chambre avant de contacter ses collègues du poste no. 3. Pendant ce temps, d’autres policiers ont été attirés par des gémissements en provenance du hangar situé dans la cour. C’est là qu’ils ont découvert Magloire Hogue, 48 ans. Il était complètement ivre. Conduit devant le cadavre de son épouse, il a baissé la tête et pleuré.
La victime, qui ne portait qu’une chemise de nuit et une jupe noire (dans ses pieds des bas noirs et une claque dans son pied gauche), était étendue sur le dos, par-dessus les couvertures d’un lit en désordre. « La victime avait eu l’artère jugulaire tranchée d’un coup de couteau. L’assassin l’avait également frappé à deux ou trois endroits près de la gorge. »17 Les draps étaient maculés de sang, tout comme les mains de Hogue. Il n’y avait aucune trace de lutte dans la pièce.
Selon les Fréchette, Hogue buvait beaucoup depuis quelque temps, ce qui affectait considérablement son couple. Le soir du drame, il avait fait irruption dans la chambre à coucher des Fréchette pour leur avouer qu’il venait de tuer sa femme tout en roulant des yeux, l’air désemparé.
Dans les vêtements de Hogue, les policiers ont retrouvé un couteau de poche portant l’inscription « Rodger » et quelques traces rougeâtres. Un journaliste de La Patrie a réussi à demander au prisonnier s’il avait bien dormi. « Mais oui, assez bien », lui a répondu Hogue. Quand il lui a demandé s’il savait qui avait tué sa femme, le principal intéressé a tout nié, affirmant être sorti en soirée faire une promenade et avoir découvert le corps de sa femme à son retour, vers 20h00.
L’enquête policière a permis d’apprendre qu’Agnès était la propriétaire de la maison. Aucun enfant n’était issu de ce mariage. Devant le coroner, Hogue « semble indifférent à tout ce qui se passe autour de lui et l’on croirait qu’il ne se rend pas compte de la terrible responsabilité qui pèse sur ses épaules. »18 Le Dr C. A. Dugas, qui a pratiqué l’autopsie en compagnie de son collègue, le Dr McTaggart, a expliqué que la rigidité cadavérique laissait croire que la mort remontait à plusieurs heures. « On a constaté que la victime portait cinq blessures sur le côté gauche du cou. Deux de ces blessures avaient deux pouces de longueur et les trois autres quelques lignes seulement. Sur le cou on remarquait aussi quelques ecchymoses produites par une forte pression de doigts. L’arrière carotide a été perforée faisant une ouverture jusqu’à la gorge. »19
Le procès de Hogue s’est instruit du 15 au 19 septembre 1904 à Montréal devant le juge Aldéric Ouimet. Au matin du 19 septembre, le jury a délibéré durant 30 minutes avant de revenir avec un verdict de culpabilité. Hogue a de nouveau fondu en larmes, un mouchoir sur son visage. Après le prononcé de la sentence, qui fixait son exécution au 18 novembre 1904, le condamné a été escorté hors du prétoire par deux gardes alors qu’il sanglotait toujours. En soirée, il a pourtant mangé avec appétit avant de dormir comme un bébé. Sa sentence a été commuée en emprisonnement à vie.
Opmerkingen