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1955, 23 mai - Suzie Timm, bébé de 9 mois



Infanticide par un meurtrier d’âge adulte –Battue à mort
Montréal – 1 SC
Vladimir Nicolay Nekrassoff, 33 ans, condamné à mort, commué en emprisonnement à vie.
            Le 23 mai 1955, Vladimir Nicolay Nekrassoff, un médecin Allemand de 33 ans, a froidement tué Suzie Timm, un bébé de neuf mois. Son procès s’est déroulé du 23 au 27 janvier 1956 à Montréal, devant le juge Wilfrid Lazure. « Tout au cours du procès, Nekrassoff était sobrement vêtu d’un complet croisé brun et d’une chemise blanche sans cravate qu’il laissait ouverte au col. Il n’a pas quitté un seul instant ses épaisses lunettes noires, montées sur broche d’or. Son avocat nous disait que sans ses verres il ne voit rien du tout. » La défense était assurée par Me Maurice Pratt alors que la Couronne était représentée par Me John Bumbray. « Il lui était impossible d’invoquer l’aliénation mentale, car les experts ont déclaré l’accusé plus que sain d’esprit, très intelligent. Me Bumbray a même souligné dans son réquisitoire, que les gens à l’intelligence fine de Nekrassoff sont un plus grand danger pour la société que les faibles d’esprit parce qu’ils peuvent plus facilement tromper et dérouter la justice. Le juge Lazure a lui-même déclaré dans ses remarques, que sans la présence d’esprit d’un journaliste qui habitait la même bâtisse que Nekrassoff, personne n’aurait peut-être jamais rien su de ce crime. »[1]
            De plus, le juge Lazure a rappelé que l’accusé avait déclaré avoir trouvé le bébé Timm râlant dans son berceau vers 8h00 et qu’il avait pris l’enfant dans ses bras. Il disait lui avoir donné une douche froide et l’avoir tapé pour la réanimer mais la petite Suzie avait succombé dans ses mains. Bref, les déclarations de l’accusé visaient plutôt à démontrer que la petite était morte suite aux mauvais traitements infligés au cours de la nuit par Mme Rogers. Le Dr Rosario Fontaine a déclaré au procès que « l’enfant avait succombé à une rupture du foie et des intestins, due à une forte pression exercée sur le corps de l’enfant. Le Dr Fontaine a aussi affirmé que de telles blessures ne laissent pas plus de trois ou quatre minutes de vie à la personne qui les subit. Or, Mme Rogers dans son témoignage avait, sans connaître la nature des blessures de l’enfant, déclaré à la police le jour de l’arrestation de Nekrassoff et encore à la Cour, qu’elle avait vu Nekrassoff sauter à pieds joints sur le pauvre petit corps de l’enfant, qui était tout couvert de blessures et de brûlures. Le juge déclara qu’il trouvait ces extraits de témoignages trop importants pour ne pas les signaler aux jurés. »[2]
            Le procès a été l’occasion pour La Patrie de mettre à jour les antécédents de l’accusé : « Nekrassoff est au Canada depuis cinq ans, il vient d’une petite ville d’Allemagne où il est né de parents russes. Au cours de la dernière guerre il ne voulut pas faire de service militaire et les autorités allemandes du temps l’incarcérèrent dans un camp de concentration où il se perfectionna en médecine. Le 4 décembre 1953, deux ans après son arrivée au Canada, il était traduit devant le juge Lazure, en Cour du banc de la reine sous une accusation de viol.  Qui était-il accusé d’avoir violée? Une fillette de 9 mois. À l’époque, tous les lecteurs de journaux pensaient que c’était une coquille, mais après vérification, il s’agissait bien de 9 mois. La mère de l’enfant, c’était Mme Rogers, celle qui habitait encore avec Nekrassoff lors de la mort du bébé Primm [sic]. À ce procès, Nekrassoff, défendu par Me Pratt, fut acquitté parce [que] la preuve fut trouvée insuffisante. Quelques jours plus tard, Mme Rogers revenait habiter avec Nekrassoff qu’elle venait de jeter devant les tribunaux. Elle a vécu avec lui jusqu’à ce 23 mai 1955, jour de la mort du bébé et de l’arrestation de Nekrassoff. »[3]
            Au moment du prononcé de la sentence, Mme Rogers est sortie de la salle avant de s’effondrer en sanglots au moment de comprendre qu’il était question de peine capitale. La demande de clémence a fait dire au journaliste de La Patrie que les jurés étaient d’accord sur le fait que le condamné était véritablement coupable mais qu’ils répugnaient la peine de mort. Quant à Me Pratt, c’est avec les larmes aux yeux qu’il a écouté cette sentence qui, un peu plus tard, sera commuée en emprisonnement à vie. Lorsqu’on lui a demandé s’il avait quelque chose à déclarer, c’est avec un fort accent allemand que Nekrassoff a répondu « nothing to say. »[4] Pour le reste, il est demeuré stoïque en prenant le chemin du pénitencier Saint-Vincent-de-Paul.
            Dans La Presse du 27 décembre 1965, on apprend qu’une fête de Noël a été organisée à l’intérieur de l’Institution Leclerc « où plus de 400 détenus ont offert, pour la cinquième année consécutive, une fête aux petits orphelins de la crèche Saint-François-d’Assise de Pointe-aux-Trembles. Certes, la mine réjouie des bambins (30 garçonnets et cinq fillettes) était en soi tout un spectacle. […] C’est donc dire que les deux principaux organisateurs de la fête, MM. Roland Primeau (personnifiant en plus le Père Noël) et V. N. Nekrassoff, se sont mérités les félicitations des religieuses responsables des petits, de leurs confrères d’infortune et des autorités de l’Institution Leclerc. M. Nekrassoff, qui a rompu avec la tradition voulant que les noms des détenus ne soit [sic] pas révélés, nous explique qu’en des circonstances malheureuses, il aurait souhaité que son nom soit tu, mais qu’aujourd’hui, il « n’avait pas de regret de ce qu’il faisait ». Nous expliquant ensuite qu’il était résigné à son sort, il a ajouté qu’il ne voyait pas pourquoi « la société refuserait maintenant de nous identifier ». »
Il semble avoir purgé un peu moins de 15 ans de prison puisqu’en 1970 il habitait un logement à Dollard-des-Ormeaux. Cette année-là, il épousait une travailleuse sociale de 42 ans du nom de Dorothy Joan Lukes.

[1] La Patrie, 28 janvier 1956.
[2] La Patrie, 28 janvier 1956.
[3] La Patrie, 28 janvier 1956.
[4] Rien à dire.
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