Homicide à motif indéterminé – Arme à feu (calibre .22) – Tueur à la chaîne? – Mise en scène
Victoriaville – 1 SC
Maurice Fraser, 34 ans, acquitté.
Le 31 octobre 1961, Jacques Côté, un jeune chauffeur de taxi de 22 ans, a été retrouvé mort dans le coffre de sa voiture de service. Comble du malheur, c’est son père qui l’a retrouvé dans cette position. Selon les premières reconstitutions de la police, « les assassins » auraient d’abord demandé à la compagnie de taxi de Victoriaville d’envoyer une voiture les chercher sur une route déserte. Ensuite, Côté aurait été forcé de sortir du véhicule avant d’être tué de deux balles de calibre .22. Son corps a été mis dans le coffre et abandonné.
Lors des premiers jours de l’enquête, un suspect a été interrogé avant d’être relâché et trois armes de calibre .22 ont été saisies. L’enquête a stagné durant quelques semaines avant qu’un autre meurtre survienne, le 5 décembre 1961. Tout a commencé au soir du 4 décembre, lorsque Mme Jean Fraser a été attaquée à son restaurant qui servait aussi de station-service. Malgré une fracture du crâne, elle avait réussi à se traîner pour atteindre le téléphone et appeler la police. En disant qu’elle avait été attaquée par son beau-frère, Maurice Fraser, la commerçante permettait aux policiers de faire une grande avancée dans leur enquête. Malheureusement, Fraser devait faire une autre victime avant qu’il soit mis hors d’état de nuire.
Le lendemain, 5 décembre, Gilbert Pépin, un autre chauffeur de taxi de 32 ans, était lui aussi sauvagement attaqué. On l’a conduit à l’hôpital Sainte-Anne de Victoriaville, mais il est décédé peu de temps après. Le même jour, on a retrouvé son corps sur une route près de Saint-Wenceslas. « Pépin s’était rendu à Victoriaville, lundi matin [5 décembre], pour y trouver un emploi et lundi midi il entrait au service de Diamond Taxi, rue de la gare, Victoriaville. Plusieurs faits laissent croire qu’il y aurait rapport entre les deux crimes […] » On parlait ici des meurtres de Jacques Côté et de Gilbert Pépin.
Lorsque Maurice Fraser a été arrêté dans une taverne de Trois-Rivières, il a dit aux deux policiers « Ok, c’est moi, ma carabine est en haut dans ma chambre d’hôtel. »
L’enquête du coroner a tenu Fraser criminellement responsable des meurtres de Jacques Côté et de Gilbert Pépin. L’enquête a été présidée par le Dr Arthur Thibeault, à Victoriaville. Fraser semblait avoir un comportement étrange. Comme l’a noté Claude Héroux, journaliste au Le Nouvelliste, « Maurice Fraser a affiché plusieurs attitudes paradoxales tout au long de l’enquête qui a duré plus de trois heures et demie. Il a éclaté en sanglots à plusieurs reprises, particulièrement lorsqu’il fut question de son enfant mais quelques minutes plus tard on le retrouvait tout joyeux avec les deux gendarmes qui l’encadraient et accompagnaient ses paroles de gestes prononcés. Mais dans certaines occasions, il se couvrait le visage de sa main droite, se plongeant dans une profonde méditation. »[1]
En octobre 1962, le juge Paul Miquelon a ordonné qu’on forme un jury spécial dont la mission serait de déterminer si Fraser était apte à subir son procès. En effet, selon l’un des psychiatres qui l’a examiné, le tueur souffrait de schizophrénie. Il faisait preuve d’une indifférence déconcertante face à ce qui lui arrivait. On a finalement pris la décision de remettre son procès à plus tard. Il a fallu attendre jusqu’en mars 1969 avant que Fraser subisse enfin son procès pour le meurtre de Pépin.
En 1968, Fraser a finalement été jugé apte à faire face à la justice. En mars 1969, il a été acquitté dans l’affaire Pépin pour cause d’aliénation mentale. Ce verdict semble avoir découragé la justice à lui intenter un procès pour le meurtre de Côté. En 1971, on s’étonnait dans les journaux de l’avoir aperçu, ici et là, se promenant en toute liberté. Maurice Fraser doit-il être considéré comme le premier tueur à la chaîne de notre Histoire?
[1] Claude Héroux, « Fraser criminellement responsable », Le Nouvelliste, 15 décembre 1961.
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