Homicide à motif indéterminé – Mise en scène et possibilité d’humiliation – Arme à feu (calibre .22)
Longueuil, extension du boulevard Rolland-Therrien – 1 SC
Non élucidé.
Diane Déry, 13 ans, habitait au 1145 rue Bizard à Longueuil, et Mario Corbeil, 15 ans, au 1139 rue Boucher, également à Longueuil. Le 20 mai 1975, sur l’heure du souper, les parents de Mario lui ont acheté une motocyclette. Selon le rapport d’enquête du sergent-détective Renaud Lacombe, il s’agissait d’une Kawasaki de couleur rouge dont le numéro de série était MC104883.
Entre 18h00 et 20h00, Mario, tout fier de son cadeau, a offert des balades à ses amis dans les rues du quartier. Vers 20h00 ou 20h15, il a fait monter avec lui son amie et voisine Diane Déry. Tous deux assis sur la Kawasaki, ils se sont éloignés dans la rue avant d’emprunter un sentier du boulevard Rolland-Therrien et de disparaître dans un boisé. C’est la dernière fois qu’on devait les voir vivants.
Vers 22h00, on a entamé des recherches qui se sont étirées durant toute la nuit. Au matin du 21 mai, vers 7h20, Romain Dubé, un homme de Ville-de-la-Plaine âgé de 42 ans qui participait aux recherches, a été le premier à trouver les deux corps. Ceux-ci avaient été criblés de balles. « Le corps de la jeune fille fut trouvé sous celui du jeune Mario Corbeil […]», écrira le sergent-détective Renaud Lacombe dans son rapport d’enquête. « Les corps étaient sur un terrain vacant situé sur le côté est de l’extension du boul. Rolland-Therrien à l’extrémité sud ». Le Soleil écrira que « d’après l’état des vêtements, la jeune fille a été violentée et sexuellement assaillie. » Or, le rapport d’autopsie ne permet pas de confirmer cette affirmation.
Les décès ont été constatés vers 10h00 par le Dr Guy De Serres. La scène de crime a été expertisée, tandis que la partie balistique a été confiée à Yvon Thériault et Robert Gaulin du Laboratoire de balistique de l’Institut de Police scientifique de Montréal. Comme le stipule le rapport du sergent-détective Lacombe signé en 1975, plusieurs personnes ont été interrogées, incluant les parents de Diane, Jacques et Nicole Déry, ainsi que ceux de Mario, Maurice et Francine Corbeil. La mort de Diane était attribuable « à la perforation du crâne et du cerveau, perforation de l’artère pulmonaire des poumons, par le passage de projectiles d’arme à feu. Le tir effectué à proximité de l’aisselle gauche s’est fait de près. »
Le rapport d’autopsie concernant Diane la décrit comme une jeune fille de 5 pieds et 1 pouce. Son cadavre présentait des rigidités aux membres et « on note des lividités dorsales et latérales gauches. » À 10h00, la température du corps sous-hépatique a été enregistrée à 27°C et à 15h00 à 18°C. Puisque les lividités ont été observées dans le dos de Diane, on en déduit qu’elle a été trouvée alors qu’elle était allongée sur le dos depuis plusieurs heures, et non sur le ventre comme certaines sources l’ont mentionné. Ce fait est donc compatible avec le rapport du détective Lacombe.
Le Dr André Brosseau, qui a réalisé cette autopsie, parle ensuite d’une « entrée d’arme à feu située à la région cervico-occipitale droite. Cette entrée a un diamètre de 0,5 cm et s’entoure d’une aréole érosive [ou collerette érosive]. » Une radiographie a permis de constater que ce projectile était demeuré dans la boîte crânienne, près de l’os ethmoïde (situé derrière le nez, entre les yeux). Et aussi un éclat métallique « à la région occipitale droite. » Un projectile déformé sera retrouvé dans l’os ethmoïde partie inférieure. Donc, le projectile à la tête n’était pas ressorti. L’hémisphère droit du cerveau et le cervelet étaient perforés. Le Dr Brosseau décrivait ainsi la trajectoire : « le projectile tiré à la tête à la région de la nuque de droite, il prend une direction de l’arrière vers l’avant, de droite à gauche et va se loger dans l’os ethmoïde à la fosse antérieure; sur son trajet il y a hémorragie et lacérations cérébro-méningées. »
Un deuxième projectile a fait son entrée à « l’aisselle gauche. Cette entrée a un diamètre de 0,7 cm et s’entoure d’une aréole érosive. Elle se situe exactement à 7 cms [sic] en-dessous de la ligne des épaules et à 6 cms en haut de la ligne mamelonnaire côté gauche. » Cette deuxième balle avait fracturé la 5e côte droite et la 2e côte à gauche. « Les deux poumons sont troués, affaissés et infiltrés de sang aux pourtours des lacérations. » La trajectoire de ce deuxième projectile est décrite ainsi : « le second projectile pénètre à l’aisselle gauche, il fracture la 2ème côte gauche, lacère le poumon gauche, prend une direction vers la droite et du haut vers le bas, lacère l’artère pulmonaire, lacère le poumon droit et va s’immobiliser à droite en latéro-dorsal vis-à-vis la 5ième côte droite qui est fracturée. Sur le T-Shirt bleu, à l’endroit de l’entrée, l’on note la présence d’un tatouage de poudre noire signifiant que le tir s’est fait de près. »
Outre les deux blessures par balle, il a noté « quelques érosions probablement secondaires à des branchailles. L’une est située au dos droit près de la ligne des épaules et est oblique, mesure 3 cms. Au quadrant des deux fesses, nombreuses marques rougeâtres. Au dos droit, en latéral, présence d’une érosion croûtée surmontant une tuméfaction sous-cutanée; cette érosion mesure 1 cm. À cet endroit, on extrait un projectile qui a été remis au département de balistique. » Apparemment, il s’agissait du projectile qui avait fait son entrée depuis l’aisselle.
Le Dr Brosseau a aussi constaté de « nombreuses petites érosions mesurant moins de 0,5 cm. À l’arrière du creux poplité [face arrière du genou] côté gauche, une égratignure oblique de 8 cm. » Concernant les organes génitaux, le pathologiste écrira que « l’hymen est dilatable, de forme annulaire et présente une petite ecchymose bleutée à cinq (5) heures. » L’estomac contenait encore « un gros repas où l’on reconnaît des légumes et des morceaux de viande. La muqueuse gastrique est sans particularité ».
Dans son rapport daté du 8 août 1975, Le Dr André Brosseau attribuait le décès de Diane aux deux points suivants : a) perforations du crâne et du cerveau, perforations de l’artère pulmonaire et des poumons par le passage de projectiles d’arme à feu; et b) le tir effectué près de l’aisselle gauche s’est fait de près. »
Dans le cas de Mario Corbeil, une radiographie a démontré « la présence d’un projectile d’arme à feu dans la tête de la victime au sein du rocher temporal droit, d’un second projectile derrière l’oreille droite dans les tissus sous-cutanés, d’un troisième projectile dans les tissus mous de la fesse supérieure gauche. »
L’auteur du DHQ a présenté une hypothèse en 2019, selon laquelle les trajectoires de tir correspondaient à la position dans laquelle les deux corps ont été retrouvés.[1] Dans le documentaire Le Dernier soir, présenté la même année sur Tou.Tv, un expert en scène de crime était plutôt d’avis que les tirs avaient eu lieu alors que les victimes étaient encore assises sur la moto. Toutefois, ces deux hypothèses sont d’avis qu’il y a eu mise en scène de la part du ou des assassins.
En 1977, les policiers ont procédé à plusieurs perquisitions chez des jeunes du secteur, dans l’espoir de retrouver l’arme du crime, une carabine de calibre .22 de marque Cooey. D’après les documents préservés dans l’enquête du coroner, les enquêteurs ont fait choux-blanc. Toutefois, en interrogeant les jeunes, un suspect se démarque aisément des autres. Ce jeune homme, dont le nom ne peut être dévoilé, s’est ensuite intégré à une bande de motards criminalisés. En 1985, il a été acquitté dans une affaire de meurtre qui ressemblait drôlement à un règlement de compte. Quelques années plus tard, selon l’auteur Pierre de Champlain, il a été expulsé vers l’Europe.
[1] Eric Veillette, « Diane Déry et Mario Corbeil, 1975 », Historiquement Logique! (blog), 8 juillet 2019, https://historiquementlogique.com/2019/07/08/diane-dery-et-mario-corbeil-1975/.
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