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1938, 30 décembre – Mme Alexis Dumont Leclerc, 66 ans[1]

Matricide – arme blanche (couteau) – surpuissance

Saint-Isidore – 1 SC

Rosaire Baillargeon, son fils de 25 ans, condamné pour démence précoce.

C’est à la résidence de la victime, dans le village de Saint-Isidore, comté de Dorchester, que le drame s’est joué. Rosaire Baillargeon, 25 ans, demeurait avec sa mère. Dans sa parution du lendemain, La Presse ignorait quel pouvait être le mobile de ce crime impliquant un fils qui tue sa mère. En effet, Mme Alexis Dumont Leclerc, 66 ans, a eu la gorge tranchée.

« Ce sont des voisins qui ont découvert le crime. Ce matin, vers onze heure et demie, le coroner David Robitaille, de St-Léon de Stanton, coroner du district, ouvrit une enquête. De S.-Isidore même il était assez difficile d’avoir des détails, hier soir, d’autant plus que le service téléphonique a fait défaut, au moment où l’on en aurait eu le plus besoin. À la Sûreté provinciale les renseignements n’abondaient pas non plus, du fait que les policiers n’étaient pas rendus, au moment où ces communications téléphoniques manquaient. […] Le meurtre a été commis, nous dit-on, au pied de l’escalier conduisant au second plancher. On suppose qu’à ce moment, menacée par son fils, Mme Leclerc voulut fuir à l’étage supérieur[e]. Apparemment, personne n’a été témoin du crime. Toutefois, des voisins seraient arrivés aussitôt après qu’il eut été commis. Avaient-ils été attirés par les cris de la victime? […] Baillargeon était considéré comme un être normal, nous dit-on. »[2]

L’enquête du coroner a permis d’apprendre que le jeune homme de 25 ans avait aussi violemment battu sa mère avant de l’achever à l’aide d’un couteau. Dès la fin de l’enquête, il a été conduit à la prison de Québec. On le destinait ensuite à revenir en Beauce pour répondre de l’accusation de meurtre. « La police dit qu’il ne fait aucun doute que la haine a été le mobile du crime. On a dit à l’enquête qu’à maintes reprises, Rosaire Baillargeon a déclaré qu’il haïssait sa mère. Il a même fait part de ses sentiments, la veille du crime, à M. l’abbé Isidore Drouin, curé du village. Il le répéta à M. l’abbé Quévillon, vicaire, et enfin aux détectives. Un des frères de l’accusé, a dévoilé que sa mère lui avait écrit, il y a quelques jours à peine, pour lui dire qu’elle avait peur de son fils, Rosaire. La veille du drame, madame Leclerc passa la nuit chez des voisins. »[3]

Le meurtrier a fait des aveux complets à la police. On raconte qu’il entretenait depuis longtemps le souhait d’éliminer sa mère et de prendre la fuite. Il a avoué sa haine envers elle parce qu’elle avait voulu faire de lui un religieux. « Elle a brisé ma vie », a-t-il dit aux policiers. Dans son journal intime, les enquêteurs de la Sûreté provinciale ont découvert que le tueur en voulait aussi à son frère.

En prison, Baillargeon est devenu songeur et soucieux. Il a même cessé de se nourrir. Il a fait ses études classiques au juvénat des Rédemptoristes, à Sainte-Anne de Beaupré mais avait abandonné les cours depuis deux ans environ. Rosaire Baillargeon n’avait pas frappé sans avertissement puisqu’il avait menacé sa mère à plusieurs reprises auparavant.

Au cours de l’après-midi du crime, il a aiguisé le couteau afin de le rendre le plus tranchant possible. L’arme était un instrument de boucherie de douze pouces de longueur et la lame faisait, à elle seule, sept pouces. C’est une querelle qui a fait déborder le vase. « À un moment donné, le malheureux jeune homme brandit le couteau qu’il portait sur lui. Effrayée, madame Leclerc sortit précipitamment sur la galerie en appelant au secours. Irrité, le jeune homme lui donna un coup de poing dans le dos. La septuagénaire roula dans la neige au pied de l’escalier. Le meurtrier s’élança sur sa victime et la frappa avec ses poings et ses pieds. Il saisit le couteau et frappa la pauvre femme à trois ou quatre reprises; Madame Leclerc fut d’abord atteinte au front. Elle a eu les deux yeux crevés. Elle fut ensuite aussi presque complètement décapitée. Il ne reste que quelques lambeaux de chair qui retiennent la tête au corps. »

Le procès de Baillargeon s’est déroulé en mars 1939. Il a plaidé l’aliénation mentale. Finalement, le jury a déterminé qu’il souffrait de démence précoce, comme l’avait suggéré un médecin appelé par la défense. La justice l’a ensuite expédié à la prison de Bordeaux, « où il sera confiné dans le département des fous criminels. »[4]


 

[1] Selon Le Soleil, elle était plutôt âgée de 70 ans.

[2] « Un fils assassine sa mère à Saint-Isidore », La Presse, 31 décembre 1938.

[3] « Rosaire Baillargeon, de St-Isidore, est tenu criminellement responsable de la mort de sa mère Mme A. Leclerc, à l’enquête du coroner », Le Soleil, 3 janvier 1939.

[4] « Baillargeon est déclaré fou par le jury à St-Joseph de Beauce », Le Soleil, 16 mars 1939.

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