Homicide à motif indéterminé – Arme blanche (hache) – Surpuissance
Montréal, 187 rue Grand-Trunk, Pointe-Saint-Charles – 1 SC
Non élucidé.
Au matin du 23 février 1913, vers 6h10, un garçon de 7 ans du nom de Victor Vautour s’est présenté au poste de police situé au 9 rue Grand-Trunk, à Pointe Saint-Charles, pour demander de l’aide. Au sergent Patrick Borden, il a expliqué que sa mère était morte et que son père était couvert de sang. Accompagné de deux collègues, Borden a suivi l’enfant jusque chez lui, au 187 Grand-Trunk. Sur place, le policier a compris qu’Anna Michaud, 39 ans, était morte. Elle était étendue dans son lit, vêtue d’une robe de nuit. Son mari, François Vautour, se tenait dans la cuisine avec ses cinq autres enfants. Il portait de profondes blessures au cou.
Par la suite, les enfants ont montré aux policiers une hache, affirmant que le responsable de l’attaque était leur oncle, un certain Alfred « Fred » Michaud, le frère d’Anna. Né le 5 mai 1868 à l’Île Verte, près de Rivière-du-Loup, ce dernier était le troisième d’une famille d’au moins huit enfants.
Durant l’autopsie, le Dr Dugas a constaté que la blessure au cou de la mère était si profonde que la lame avait atteint la colonne vertébrale au niveau de la 6ème vertèbre. À 14h45, François Vautour succombait à son tour. La tragédie venait donc de faire six petits orphelins.
L’enquête du coroner McMahon s’est ouverte le 24 février. Théodore Vautour, 9 ans, a dit s’être levé vers 5h00 du matin et en se dirigeant vers la chambre de ses parents, il avait découvert du sang. « Je me suis rendu dans la cuisine pour m’habiller, mon père m’a demandé de l’eau et des essuies mains, ce que j’ai fait. Mon père s’est couché, et après un certain temps a dit à mon petit frère d’aller chercher la police ». Il a ajouté que son oncle était entré dans sa chambre vers 3h00 pour tenter de l’étrangler, sans prononcer la moindre parole. Fred Michaud aurait aussi tenté d’étouffer les autres enfants, apparemment sans succès. Théodore a également précisé que la hache ayant servie à commettre les crimes n’appartenait pas à son père. En fait, il ne l’avait jamais vu avant cette nuit-là.
Pour sa part, le petit Victor Vautour a affirmé avoir vu Fred Michaud s’en prendre à son père. Et avant de mourir, François Vautour avait corroboré ce détail aux policiers. Selon le témoignage de Pierre Vautour, le frère de François, Fred Michaud aurait été expulsé de la résidence des Vautour parce qu’il aurait eu un comportement déplacé envers l’une des fillettes. Toutefois, l’une des sœurs d’Anna a dit au coroner que celle-ci s’était déjà confiée sur le fait que son mari l’avait déjà menacé avec un couteau.
À la reprise de l’enquête du coroner, le 4 mars 1913, on parlait maintenant de la possibilité que les blessures infligées à François Vautour aient pu être faites par sa femme, laissant entendre que celui-ci aurait pu la tuer ensuite. Bref, on était en train d’exposer un scénario selon lequel le couple s’était entretué. Rappelé comme témoin, Théodore Vautour n’était maintenant plus certain d’avoir vu son oncle.
Le 11 mars, troisième et dernière journée de l’enquête du coroner, Fred Michaud a été appelé comme témoin. D’après ce qui reste aujourd’hui de l’enquête du coroner dans les archives de BAnQ, Michaud se serait contenté de nier et de dire qu’il se trouvait chez lui au moment des faits. Le coroner McMahon a donc conclu que le double meurtre avait été commis « par une personne inconnue. Jusqu’ici la preuve ne nous permettant [pas] de retenir Alfred Michaud […] le magistrat, dans une explication extrêmement claire et concise indique les points saillants du drame, et semble écarter la version de querelle entre les époux ».
Pour sa part, Michaud a célébré sa remise en liberté en serrant des mains et en déclarant que « la justice de Dieu est la plus équitable. » Cette affaire de double meurtre n’a connu aucun autre développement judiciaire. Les meurtres de François Vautour et de sa femme n’ont jamais été résolus. Pire encore, la lecture de l’enquête du coroner laisse entendre que François aurait pu tuer sa femme avant de s’enlever la vie.[1]
[1] Parmi les orphelins du couple, on sait que Bella, née en 1906, a épousé Jean-Marie Eugène Cartier en 1936 avant de s’éteindre le 5 novembre 1973. Gilberte Vautour, la jumelle de Bella, a épousé un chauffeur de taxi en 1930 avant de mourir le 18 décembre 1947. L’un de ses fils, Roger Lanoix, est mort en 1992. Victor Vautour, qui connaîtra certains démêlés avec la justice, a épousé Eva Massé en 1927. Il s’est éteint le 1er octobre 1977 à Montréal.
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