Homicide sexuel – objet contondant – séquestration (bâillon)
Péninsula, Baie de Gaspé - ? SC
Non élucidé. Nelson Philipps, leur cousin, condamné à mort, puis acquitté.
Le 31 août 1933, dans la petite localité de Péninsula, un petit village de la Baie de Gaspé, les cousines Marguerite et Maud Ascah, 13 ans, ont quitté la demeure de leur tante Flo Peters pour rentrer chez elles. Le lendemain, elles devaient partir à Québec pour leurs études. Au cours du trajet, environ 1,6 km, les jeunes filles ont été aperçues au bord de la route en compagnie de leur cousin Nelson Philipps, un livreur d’épicerie, et d’un autre jeune homme. C’est la dernière fois qu’on les voyait vivantes. Peu après, on a découvert le corps de Maud Ascah et Nelson Philipps a aussitôt été arrêté. Son procès s’est tenu en février 1934 au palais de justice de Québec.[1] Selon un témoin, un homme a été vu le soir de la double disparition en train de débarquer d’une chaloupe avant de se diriger vers le hangar d’Austin Philipps, le père de l’accusé. Selon le Dr Rosario Fontaine, Maud aurait été bâillonnée par un morceau de linge, en plus de subir une fracture « de l’oreille au milieu de la tête » et qui aurait été infligée par un instrument contondant. Elle serait morte avant d’être jetée à l’eau puisque l’estomac ne contenait aucun liquide.
Durant le procès, on a aussi appris que le père avait demandé à son fils : « as-tu réellement tué ces deux jeunes filles? » Et Nelson Philipps aurait répondu : « oui, et je ne sais pas pourquoi. » Deux femmes ont aussi entendu le cri d’une femme qu’on était en train de bâillonner. Le même soir, l’accusé a été vu sur la route vers 21h45 et il paraissait excité. Un bracelet appartenant à Marguerite a été retrouvé sur la grève, près des hangars appartenant aux Philipps. Dans les aveux de Philipps, qui ont été acceptés en preuve, on découvre qu’il a admis s’être réveillé sur la grève au côté des corps des deux victimes. Il a même ajoutée : « Maud avait la tête fracassée et Marguerite perdait beaucoup de sang. Il a pris un morceau de la robe de Maud pour lui bander la tête. Il a transporté les deux cadavres dans l’embarcation non loin de là et a gagné le large. Il a attaché une pierre à chacun des deux corps et a jeté les victimes dans l’eau à environ 700 ou 800 pieds de la rive. Il est revenu et a constaté qu’un béret blanc était resté sur le sol. Il l’a enterré avec du sable et il est retourné chez lui. Il était 10 heures et demie. »[2]
Reconnu coupable, Nelson Philipps a été condamné à mort. Il a cependant eu droit à un nouveau procès au cours duquel ses aveux ont été jugés irrecevables. Cette fois, il a été acquitté.[3] L’auteure Anne Hébert s’est inspirée de l’affaire pour écrire son roman Les fous de bassan. Le corps de la petite Marguerite Ascah n’a jamais été retrouvé.
[1] L’un des avocats de Philipps était Me Dominique Lévesque, père du futur premier ministre du Québec, René Lévesque.
[2] L’Action Catholique, 24 février 1934.
[3] Austin Philipps est mort en 1941. C’est son fils Nelson qui a repris la gestion de l’épicerie et le bureau de poste de Penouille. Le 19 novembre 1946, il a épousé Agnes Mullin. Il s’est occupé du commerce jusqu’en 1970. Il s’est éteint le 15 janvier 1985.
Procès de Nelson Philipps, 20 janvier 1934
Devant le juge Greenshields.
Premier témoin appelé, Jérémie Bond, pêcheur de 55 ans. Il est interrogé par Me Valmore Bienvenue, de la Couronne.
- Monsieur Bond, vous dites que vous restez à Gaspé, vous?
- Oui.
- À quelle distance restez-vous de la pointe Penouille?
- De la pointe Penouille à aller au magasin, dans le milieu de la pointe.
- Maintenant, Monsieur Bond, voulez-vous dire si vers le 28 octobre vous avez trouvé quelque chose dans la baie, à Penouille?
- Oui.
- Racontez donc qu’est-ce que c’est que vous faisiez à ce moment-là, quand vous avez fait la découverte?
- Je partais pour pêcher, le matin. Vu que la mer montait, j’ai [a]bandonné. J’ai dit à mon petit garçon : « On n’ira pas à la pêche. On n’ira pas prendre de poisson. Nous reviendrons prendre du poisson en montant. » Ce matin-là, elle était trop montée.
- À quelle heure êtes-vous parti, ce matin-là, pour aller à la pêche?
- À 6h00, monsieur.
- Est-ce qu’il y avait eu une tempête, dites-vous, avant ça?
- Oui.
- Combien de temps avant la tempête avait-elle commencé?
- Une journée avant.
- Alors, à 6h00, qu’est-ce que vous avez fait?
- On a marché comme deux cents pieds, je crois bien, à peu près. Je mets ça à peu près, et j’ai vu le cadavre dans l’eau, dans trois pieds d’eau.
- Vous dites que vous avez vu un corps dans trois pieds d’eau?
- Oui.
- Est-ce qu’il sortait, le corps, ou s’il était au fond?
... à suivre
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