Homicide sexuel – Strangulation – Enlèvement – Viol
Abitibi, entre Val d’Or et Baie Carrière – 2 SC?
Billy Taillefer et Hugues Duguay, condamnés à perpétuité.
Le 9 mars 1900, après avoir passé une nuit avec son copain, Sandra Gaudet, 14 ans, est disparue. Elle a quitté seule vers 23h45, à Val-d’Or. Pour se rendre voir Steve Fortier, elle avait pour habitude de prendre un chemin qui passait près de la résidence de Laurent Taillefer.
Le lendemain, sa mère, Denise Gaudet, a rapporté sa disparition. Dès le 11 mars, les policiers ont ouvert une enquête et on a même diffusé un message à la radio. Le 12 mars, c’est un camionneur et sa femme qui découvrent le cadavre de la jeune fille en bordure d’un chemin de Val-d’Or. Assez rapidement, on a déterminé qu’elle avait été violée et assassinée. Elle ne portait que des bas et un soutien-gorge détaché et déchiré. Le décès a été attribué à une strangulation manuelle. Par ailleurs, l’autopsie a démontré que Sandra portait des morsures aux seins et à la vulve.
Par ailleurs, un camionneur et son fils ont raconté aux policiers avoir vu une camionnette route stationnée « sur le bord du Chemin Baie des Carrières, près de l’endroit où le corps a été retrouvé, entre 5h30 et 6h00 le 10 mars 1990. Il identifiera plus tard ce véhicule comme le Tracker rouge propriété de Laurent Taillefer. »[1]
Les enquêteurs ont ensuite appris que dans la nuit du 9 au 10 mars, Laurent Taillefer avait demandé à un collègue de le remplacer pour le reste de son quart de travail. Taillefer avait quitté en direction de chez lui, au volant de son Tracker rouge. Il a même acheté de l’essence à 3h10 à Val d’Or au matin du 10 mars. De plus, une locataire habitant juste au-dessus de Taillefer a entendu du bruit étrange vers 0h10 le 10 mars, comme si des gens se bagarraient. Mme Martel a aussi entendu, vers 6h00, des bruits de douche à deux reprises. Un peu plus tard, deux hommes sortaient du logement pour aller au dépanneur. Une autre voisine a entendu le long cri de l’adolescente.
Les policiers ont obtenu des mandats pour effectuer de l’écoute électronique afin d’en apprendre plus sur les agissements des Taillefer et de Duguay. Ainsi, ils récolteront au moins deux conversations incriminantes qui seront plus tard déposés en preuve.
Le 27 avril 1990, Billy Taillefer et Hugues Duguay ont été arrêtés. Dans la voiture de police, Taillefer lance : « On voulait pas la tuer, c’était un accident. » Une fois au poste, il a ajouté : « De toute façon, nous autres, on voulait juste avoir du fun. Ça a été un accident. Ça a été plus loin qu’on pensait. » Le 28 avril, Taillefer et Duguay signent tous les deux leurs aveux. Quelques heures plus tard, les enquêteurs ont effectué une visite des lieux avec Taillefer qui leur a indiqué le trajet qu’il a emprunté avec son complice. Il leur montre l’endroit où ils ont abandonné le corps et les vêtements. Pendant cette sortie, Taillefer a aussi admis avoir amené sa victime à l’appartement de son père, Laurent Taillefer. C’est là que la victime a été étouffée parce qu’elle criait en plus de se débattre.
Lorsque le père est rentré chez lui vers 4h00 de la nuit, il leur a dit de se débarrasser du cadavre. Peu après, c’est précisément ce qu’ils ont fait. Selon le jugement de l’honorable juge Marc Paradis, c’est à ce moment que Taillefer a écrit un mot à la famille de sa victime. Le 30 avril, Taillefer et Duguay ont été accusés de meurtre au premier degré.
Le 1er février 1991, suite à leur procès, Taillefer et Duguay ont été reconnus coupables et condamnés à perpétuité sans possibilité de libération avant 25 ans. Probablement motivés par leurs avocats, les deux hommes ont porté leur cause en appel mais la Cour d’appel rejette leur requête le 12 juin 1995. Toutefois, cette même Cour a accordé à Duguay la tenue d’un deuxième procès, cette fois sous l’accusation de meurtre au 2e degré. Malgré cela, le 16 août 1995, Duguay a décidé de plaider coupable à une accusation d’homicide involontaire. Il est aussitôt condamné à 12 ans de prison.
Taillefer a demandé une autorisation de pourvoir sur le jugement de la Cour d’appel, mais cette requête lui a été refusée par la Cour suprême en février 1996.
Lors de la Commission Poitras, en 1999, l’affaire a refait les manchettes. « On apprend que des informations favorables à Taillefer et Duguay ont été cachées à la défense. En 2002, la Cour Suprême a accepté de se pencher sur le dossier. Un an plus tard, elle décrétait un arrêt des procédures dans le cas de Duguay et un nouveau procès pour Taillefer. Ce deuxième procès n’aura cependant pas lieu, puisque la Couronne soutient ne plus avoir de preuves susceptibles de convaincre un juge hors de tout doute raisonnable. »[2]
En 2006, les Taillefer et Duguay ont été libérés après que la Cour supérieure ait reconnu que leurs aveux étaient irrecevables. Les deux hommes ont poursuivi la Ville de Val-d’Or, le DPCP et la SQ pour une somme de 40$ Millions. En février 2023, la Cour supérieure a rejeté la poursuite.
En 2019, le criminaliste Jean-Claude Bernheim a présenté un livre dans lequel il dénonçait cette injustice, en plus d’exiger la réouverture de l’enquête. Le livre a également alimenté le contenu d’un documentaire télévisé. Jusqu’à maintenant, rien n’est venu ébranler le verdict de culpabilité prononcé à l’endroit de Taillefer et Duguay. Autrement dit, ce n’est pas parce qu’il aurait pu y avoir des irrégularités dans l’enquête que les deux hommes sont innocents pour autant d’avoir violé et tué Sandra Audet.
Le milieu culturel s’en est mêlé en octobre 2019 en invitant Taillefer et Duguay à l’émission Tout le monde en parle.
En octobre 2024, Duguay s’est enlevé la vie.
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